Grands-parents : boucs émissaires d'un conflit familial
Notre histoire, débutée il y a dix ans, reflète une réalité cruelle que vivent de nombreux grands-parents aujourd’hui : être privés de leurs petits-enfants et devenir les boucs émissaires de conflits familiaux. Ce que nous avons traversé nous tous les deux a brisés, moralement et physiquement.
Tout a commencé par un malentendu apparemment anodin : une série de messages envoyés par notre fille aînée auxquels nous n’avons pas pu répondre en raison d’une panne de smartphone. Elle aurait pu nous joindre autrement ou venir nous voir, comme elle le faisait souvent, mais elle ne l’a pas fait. Cet incident est pourtant devenu le prétexte d’une rupture brutale. Peu de temps après, son conjoint nous a annoncé que nous ne verrions plus nos petits-enfants.
Nous avons tenté de rétablir le dialogue par une médiation familiale, mais celle-ci nous a été refusée. Face à cette impasse, nous avons engagé une procédure judiciaire pour obtenir un droit de visite. Ce qui devait être une démarche pour protéger nos liens familiaux s’est transformé en un véritable cauchemar. Depuis que la loi a été modifiée pour permettre aux petits-enfants de demander à tisser des liens avec leurs grands-parents, les juges aux affaires familiales (JAF) donnent le plus souvent raison aux parents, invoquant la nécessité de ne pas mettre les enfants au cœur du conflit familial. Mais comment un enfant peut-il alors demander à voir ses grands-parents si le système s’y oppose ?
Durant six ans de procédure, nous avons été confrontés à un système judiciaire qui a alimenté plus de conflits qu’il n’en a résolus. Malgré nos efforts et de nombreuses preuves apportées, nos témoignages ainsi que ceux de nos proches et de professionnels ont été systématiquement rejetés ou ignorés. Le mot magique mis en avant à notre encontre, « toxiques« , a suffi à disqualifier nos intentions. Des accusations infondées ont amplifié une souffrance déjà immense, et même les experts psychologues mandatés semblent souvent soutenir que, pour apaiser les conflits, la rupture entre grands-parents et parents est préférable.
Mais au-delà de ce combat juridique, une autre vérité, plus difficile à accepter, s’est imposée à nous : il semble que nous étions devenus les boucs émissaires d’un conflit profondément ancré entre nos deux filles. Leur relation, marquée vraisemblablement par une jalousie latente depuis l’enfance, semble avoir pris le dessus. Avec le temps, leurs différences se sont cristallisées : l’aînée travaille auprès de la petite enfance, tandis que la cadette, scientifique et ingénieur agronome, mène une carrière brillante. Des parcours de vie diamétralement opposés, mais unis dans une alliance contre nous, leurs parents, pour éviter d’affronter leurs propres blessures.
Après six ans de lutte, plus de 14 000 € de frais et une santé gravement atteinte, nous avons dû abandonner. Mon époux a développé le « syndrome du cœur brisé * » et prend aujourd’hui des antidépresseurs. Quant à moi, je vis avec une hypertension chronique. Nous avons dû accepter l’impensable : faire un « deuil blanc » de nos enfants et petits-enfants.
Ce que nous avons vécu dépasse le simple conflit familial. Il s’agit d’une véritable violence psychologique, où des grands-parents, pourtant bienveillants, se retrouvent injustement exclus et désignés coupables. Pourtant, nous n’avons jamais arrêté d’aimer nos enfants et nos petits-enfants. Notre seul tort a été d’espérer préserver un lien familial dans un contexte où tout semblait jouer contre nous.
Nous partageons ce témoignage pour sensibiliser à une réalité trop souvent ignorée. Être grand-parent, ce n’est pas seulement aimer à distance : c’est être un lien précieux, une source de transmission et de soutien. Lorsque ce lien est brisé, c’est une part entière de notre identité qui disparaît.
* Le syndrome du cœur brisé, ou cardiomyopathie de stress, également appelé syndrome de Takotsubo, résultant d’une accumulation de stress intense qui provoque une fragilité émotionnelle pouvant entraîner une paralysie temporaire du muscle cardiaque.
Brève analyse psychologique
Analyse psychologique du groupe des filles
Les filles semblent entretenir une relation marquée par une jalousie latente, possiblement non résolue depuis l’enfance. Cette jalousie, exacerbée par des parcours de vie très différents – l’une dans la petite enfance, l’autre dans la science –, a pu engendrer un mécanisme de projection : elles unissent leurs chagrins et leurs blessures personnelles pour les détourner vers un ennemi commun : leurs parents. Ce comportement pourrait refléter une difficulté à gérer leurs propres émotions conflictuelles et à assumer leurs responsabilités individuelles.
Analyse psychologique des grands-parents
Pris dans le rôle de boucs émissaires, ils subissent une double peine : le rejet familial et la culpabilisation. Leur bienveillance naturelle et leur désir de maintenir le lien les rendent particulièrement vulnérables aux accusations de « toxicité », qui deviennent un levier psychologique dans les conflits. La douleur de la rupture, accentuée par leur investissement affectif et financier passé, engendre un profond sentiment d’injustice et un processus de deuil difficile.
Analyse de la situation globale
La situation reflète une dynamique familiale dysfonctionnelle basée sur la triangulation : chaque groupe se positionne autour d’un conflit commun, mais sans résolution directe. Les juges et experts psychologues ont établi la coupure des liens, constituant la rupture comme un moindre mal pour éviter d’exposer les enfants à des conflits intergénérationnels. Cette situation, bien que justifiée sur le plan juridique, aggrave le sentiment d’exclusion des grands-parents et la non-résolution des conflits sous-jacents entre les filles.
Geneviève Schmit – 12 janvier 2025
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Geneviève Schmit.
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Bonjour Martine, Je suis profondément touchée par votre message et la situation dans laquelle vous décrivez. Il est très inquiétant…