Hommes battus, femmes battues, même accueil?
Une femme victime de violence conjugale n’est pas forcément prise au sérieux par la justice alors un homme, je n’ose imaginer! »
Julien
Bien souvent, l’homme ne se sent pas « légitime » dans la posture de victime.
Le sujet des hommes pervers étant un sujet large, j’ai choisi de découper cet article en 4 parties. Le premier point sera traité ici, et les 7 points suivants découpés sur 3 prochains articles.
- Introduction
- Des visions différentes de la relation perverse. (partie 1)
- La place de la justice face aux hommes victimes. (partie 2)
- Homme battus, femmes battues, même accueil ? (partie 3) (cette page)
- Homme battus, femmes battues, même comportement ? (partie 3) (cette page)
- Points d’obstacles rencontrés par les hommes victimes. (partie 3) (cette page)
- Pourquoi les hommes restent-ils dans la relation perverse ? (partie 3) (cette page)
- Difficulté de séparer le vrai de l’exagération dans l’histoire perverse. (partie 4)
- Du sentiment de culpabilité à la résilience. (partie 4)
Yann nous confie: « Je pense que l’ego masculin aura bien du mal à digérer d’être une « victime » de qui que ce soit et peut être plus encore d’une femme. Le « rôle » masculin est déterminé depuis la nuit des temps dans celui d’un être « fort », sûr de lui et sensé contrôler ses émotions ainsi que les différents aspects « matériels » de sa vie et de sa famille. Le fait d’être désigné « victime » par la société, est difficile à assumer sans une certaine sagesse, c’est à dire celle d’avoir compris les tenants et les aboutissants de l’histoire vécue ainsi que les « responsabilités » de chacun pour enfin les accepter et s’en détacher. Mettre cette posture au grand jour et montrer au monde entier, ainsi qu’à soi-même, la représentation de cette « faiblesse » potentielle est particulièrement difficile à assumer. »
Comme face à la justice, l’homme en souffrance ne semble pas rencontrer le même accueil que la femme. Nous avons pu le développer un peu plus précédemment.
Une différence fondamentale dans l’accueil des hommes victimes réside dans le fait qu’à l’inverse des femmes, très peu de structures leurs sont dédiées. Il faut du temps pour que les voix se libèrent encore plus et pour que se mette en place des organisations sérieuses qui leurs viennent en aide. Les femmes ont pris 50 ans d’avance sur ce sujet [1]…et les hommes eux, restent encore bien trop dans le silence. La libération de leur propre voix ne se fera qu’au terme d’un long travail d’affirmation de soi, de sagesse et de communication intelligente.
A ce jour je ne connais qu’une seule association française, bien cadrée, qui entre dans mes critères de qualité, de respect et dans une écoute active de l’homme victime de violence conjugale: » SOS Hommes Battus France[2]« . Cela ne veut pas dire qu’il n’en existe pas d’autres, en France et ailleurs, et je compte sur elles pour se rapprocher de moi afin que je les rajoute à ma liste si j’y retrouve mes critères.
Un homme maltraité psychologiquement ou physiquement doit pouvoir dépasser la honte qui peut l’assaillir. Ce travail personnel peut se faire en tentant de sortir de la posture statique de « victimes » pour entrer progressivement dans celle d’auteur de sa propre vie et de résilience.
LIEN VERS MON SITE: https://www.soutien-psy-en-ligne.fr/sortir-de-la-honte/
Sortir de la honte en 5 étapes par les valeurs personnelles
Reprendre son pouvoir c’est retrouver la liberté de ses propre choix et donc, sa responsabilité.
Il me semble que cette évolution prendra encore du temps… A ce jour, dans les discussions dédiées aux hommes victimes de violences conjugales, je lis encore beaucoup trop de colères concernant le peu d’intérêt que la société porte aux hommes victimes en comparaison de celle portée aux femmes. Je pense que cela vient essentiellement d’une méconnaissance de ce que vivent les femmes car, les arguments et témoignage avancés peuvent bien souvent être déclinés au féminin. C’est le problème d’une analyse de situations sans recul, faite qu’au travers de sa propre expérience et parfois partagée avec d’autres hommes vivant la même chose. Par ailleurs, pour nous, accompagnants, il est bien difficile d’avoir les témoignages et la collaboration des hommes concernés afin d’affiner notre compréhension.
Il n’est pas inscrit dans l’atavisme[3] de l’homme (masculin) de se laisser dominer pas la violence d’une compagne. L’incompréhension de la situation et la honte peut alors le submerger totalement.
Il arrive même que l’homme agressé par sa compagne n’ose pas répondre à la violence par peur que sa force naturelle ne l’amène à la blesser ou même la tuer. J’ai reçu un jour en consultation un homme physiquement très grand et fort, bucheront de surcroits, terrorisé car sa femme, infirmière toute menue, le frappait avec des objets. Certains pourraient sourire de la situation mais pourtant, il se sentait en grand danger car, s’il se laissait aller à réagir physiquement dans un geste de colère, il savait que sa force pourrait avoir raison de son épouse.
Rien n’est simple pour l’homme victime de violence conjugale, peut-être même plus compliqué que pour la femme dans la même situation.
Dépasser la honte, oser affronter les Forces de l’Ordre et leurs codes parfois machistes qui les amènent à être incrédules face à la situation, et les pousse parfois à la raillerie, est une épreuve presque « initiatique« . Oser dire: « Moi, un « homme », je me fais maltraiter par ma compagne. » est la preuve d’une grande force de caractère que je souhaite à tous ceux qui sont dans cette situation.
Homme battus, femmes battues, même comportement?
La parité des comportements existe-t-elle réellement dans le cadre des violences conjugales ? Les idées véhiculées par les réseaux sociaux poussent à penser que oui, mais, il semble bien que la réalité soit tout autre.
Nous pouvons observer que le comportement des hommes et des femmes victimes de violence conjugale amènent à certaines réactions vraiment similaires. Pour exemple, quelle que soit la personne simulatrice ou victime, c’est une course vers le commissariat qui va prendre la déposition du premier arrivé ! Ce comportement n’est toutefois pas déterminant pour discerner le manipulateur, homme ou femme, de sa proie.
Comme son pendant féminin, l’homme victime risque de plonger dans les méandres de l’angoisse, de l’affolement, de la dépression, ainsi que du désir de reconnaissance et d’une justice impartiale.
LIEN VERS MON SITE: https://www.soutien-psy-en-ligne.fr/aide-victimes-pervers-narcissiques/gerer-crises-panique/
Comment affronter un pervers narcissique dans de bonnes conditions ?
L’homme victime aura peut-être plus de mal à réagir pour différentes raisons que nous avons déjà évoquées (honte, peur d’être mal reçu, traditions culturelles, triste image de soi-même …) Pour ces mêmes raisons, il aura aussi beaucoup plus de mal à faire en sorte ce que son vécu et sa souffrance soient correctement accueillis et retransmis.
Les hommes victimes de violence conjugale vont affirmer être nettement moins bien défendu que les femmes victimes. Les femmes diront l’inverse… Mon expérience et mon regard extérieur me permettent de dire qu’aujourd’hui encore, l’homme rencontre plus de difficultés que la femme victime de souffrance conjugale. Mais nous ne sommes pas là pour compter les points. Il y a tellement de paramètres en jeux que même mon impression peut en perdre son sens.
Points d’obstacles rencontrés par les hommes victimes
Les obstacles rencontrés par les hommes victimes de violence intrafamiliale, même si elles ressemblent fort à celles que rencontrent les femmes dans la même situation, se voient renforcés par le poids de la tradition patriarcale qui nous a construits depuis la nuit des temps. Ce n’est que très récemment que les femmes ont revendiqué leur droit d' »exister« , et, peut-être, emportés par cette lame de fond, les hommes celui de pouvoir exprimer leurs sensibilités.
Nous sommes encore dans l’apprentissage de ces nouveaux comportements, celui de l’écoute et celui de la juste parole, et, comme toujours, sortant d’un excès, nous plongeons dans un autre opposé à celui-là afin de trouver, peut-être, avec le temps et la sagesse, un équilibre bénéfique pour tout le monde.
Les difficultés rencontrées par les hommes sont multiples et proviennent aussi bien d’eux-mêmes que de l’environnement.
« Avouer » être maltraité, voir même battu par sa compagne n’est pas quelque chose d’admissible par les autres hommes également. Il n’est pas « acceptable » qu’un homme puisse être « victime« … Celui qui reçois cette confidence, qu’elle soit amicale ou lors d’une plainte au Commissariat, se trouve confronté à quelque chose qu’il ne peut, ni ne veut voir: la « faiblesse masculine« , celle qu’il sent en lui peut-être. Et pourtant…
L’homme victime d’une telle situation peut se sentir déshonoré dans son statut de « mâle » acquis de nos ancêtres.
Pourtant il ne s’agit nullement de « faiblesse » mais bien souvent, et au contraire, d’une grande force; celle d’oser se libérer par la parole et par des actes réfléchis.
L’humain, et peut-être l’homme plus encore que la femme, est mût par son ego qui le contraint à toujours vouloir être plus fort que l’autre. La société toute entière a modelé ce schéma utile du temps des cavernes et en a oublié les raisons. Aujourd’hui, au 21ème siècle, ces raisons ne sont probablement plus justifiées mais les habitudes inscrites dans nos gènes ont la vie dure. Ce n’est pas une, ni même deux générations, qui modifieront des constructions psychologiques et génétiques acquises depuis des milliers d’années.
L’homme (masculin) semble accroché à ses « avantages » ne sachant peut-être pas encore comment survivre s’il s’en libérait. Je dis bien « libérer » car il me semble que pour beaucoup c’est un carcan placé là par leurs ancêtres et dont ils ne veulent plus réellement. On voit aujourd’hui l’effet pervers de « #Metoo[4] » qui, partant d’une volonté parfaitement légitime, bénéfique et justifiée de libération de la parole des femmes ayant subi des viols et des agressions sexuelles, ouvre la porte à de multiples formes d’abus.
Comme toujours, la mécanique psychologique fait qu’en se libérant d’un excès, on en vient à en exercer un autre inverse avant de trouver l’équilibre à condition toutefois les individus concernés retrouvent un peu de paix et qu’il n’y ait pas eu trop de ravages…
La recherche de la reconnaissance et du respect ne doit pas se faire au détriment de l’autre.
Pourquoi les hommes restent-ils dans la relation perverse?
Toute personne qui reste prisonnière de la violence intraconjugale l’est, soit parce que la peur de partir en affrontant les différentes vérités est plus grande que celle de souffrir, soit qu’elle est sous emprise, ou même, et la plupart du temps, pour ces deux raisons, et d’autres encore, simultanément. Il est également vrai que le fait d’avoir consacré des années à tenter de construire un couple peut pousser certains à l’entêtement de vouloir poursuivre l’effort car, renoncer, serait admettre avoir sacrifié tant d’années, d’énergie et d’argent pour rien.
L’emprise perverse est une « malfaçon » que l’on peut réparer.
Pour se libérer de l’emprise il faut d’abord, et avec beaucoup de sincérité:
- S’armer de courage !
- Réaliser que l’on souffre soi-même d’un problème au niveau de la dépendance affective et des limites.
- En comprendre les contours. De mettre à plat la situation avec un spécialiste.
- Vouloir courageusement changer cela.
- Comprendre et d’assumer sa part de responsabilité.
- Mettre en place toutes les stratégies nécessaires pour se libérer.
- Apprendre à mieux gérer son stress et ses crises d’angoisses
- Renforcer la résistance de l’organisme (Vitamine, Oligoélément, nourriture saine, sommeil, bon air, etc. …)
- Se faire accompagner aussi bien par les amis encore présents, la famille, des professionnels.
- Serrer les dents jusqu’au bout et ensuite sabrer le champagne !
Ce chemin de sortie de l’emprise perverse peut-être comparé à différents marathons qui vont se succéder jusqu’à la vraie « libération ». La libération passe par la compréhension et l’évolution positive de ce qui, en soi, a rendu tout cela possible et qui donc ne se reproduira plus.
Mon Dieu, donnez-moi la sérénité d’accepter les choses que je ne peux pas changer, le courage de changer celles que je peux changer et la sagesse de distinguer les premières des secondes.
Marc-Aurèle
Mon collègue partage avec moi la situation dramatique d’un homme, Danois en France depuis 20 ans, 1m 80, ayant tout pour plaire. Il a un métier à haute responsabilité dans la communication internationale. Son épouse, un tout petit bout de femme chinoise, après dix ans d’union où elle l’a broyé et fait le vide autour de lui, est partie du jour au lendemain sans qu’il n’en soit informé. Pour ce départ, elle a fait retirer du luxueux appartement face à la Tour Eiffel tout ce qui était neuf et avait de la valeur, même le linge de maison, les CD, les ordinateurs, bref, tout ce qui avait de la valeur laissant tout le reste. Elle a également pris plus de 200 000€ et tous les bijoux. Elle a pu amasser cette somme par divers prêts obtenus aves des faux documents et signatures. Aujourd’hui, des années après, il paie encore les remboursements. Cet homme puissant, pratiquant la boxe comme loisir, s’est replié sur lui-même. Les dix ans de vie commune sur le mode masochiste, manipulateur, pervers ont eu raison de lui. Elle était d’une incroyable méchanceté, lui assenant parfois des coups de club de golf dans le dos et sur les pieds. Il n’a bien évidemment jamais osé déposer plainte. Lui qui faisait de somptueuses fêtes avec ses amis a plongé dans une dépression profonde car il ne peut le dire. Heureusement, dans son malheur il n’a pas eu d’enfant. Sans ce départ dramatique, il ne l’aurait jamais quitté… Personne n’était au courant de ce drame, pas même la gardienne d’immeuble …
Il y a une forme d’ego qui empêche l’homme de parler et de demander de l’aide… ou alors il en parler à tout le monde, sans discernement. C’est une question de tempérament.
Geneviève SCHMIT
mai 2022
Le sujet des hommes pervers étant un sujet large, j’ai choisi de découper cet article en 4 parties. Le premier point sera traité ici, et les 7 points suivants découpés sur 3 prochains articles.
- Introduction
- Des visions différentes de la relation perverse. (partie 1)
- La place de la justice face aux hommes victimes. (partie 2)
- Homme battus, femmes battues, même accueil ? (partie 3) (cette page)
- Homme battus, femmes battues, même comportement ? (partie 3) (cette page)
- Points d’obstacles rencontrés par les hommes victimes. (partie 3) (cette page)
- Pourquoi les hommes restent-ils dans la relation perverse ? (partie 3) (cette page)
- Difficulté de séparer le vrai de l’exagération dans l’histoire perverse. (partie 4)
- Du sentiment de culpabilité à la résilience. (partie 4)
[1] 26 août 1970 – Dix femmes déposent une gerbe « à la femme du soldat inconnu » sous l’Arc de triomphe à Paris. Cette manifestation marque la naissance du Mouvement de libération des femmes (MLF).
[2] « Association d’aide et d’assistance aux hommes victimes de violences domestiques. » – www.soshommesbattus.org et https://www.facebook.com/groups/1092185144510220
[3] Atavisme: caractère ancestral
[4] Le mouvement #MeToo est un mouvement social encourageant la prise de parole des femmes, afin de faire savoir que le viol et les agressions sexuelles sont plus courants que ce qui est souvent supposé, et afin de permettre aux victimes de s’exprimer sur le sujet. Il a débuté en 2007 et est particulièrement connu depuis octobre 2017 à la suite de l’affaire Weinstein. (Wikipédia)
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Geneviève Schmit.
Facebook pour les victimes de violence psychologique et de manipulation perverse. Soutien.Psy
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