Violence conjugale, hommes/femmes. Manipuler les chiffres pour camoufler l’inaction

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Le jeux des chiffres : l’illusion de l’action

Violence conjugale - Jouer avec les chiffres pour masquer l'inaction

Les violences conjugales, qu’elles touchent des hommes ou des femmes, sont une réalité que les chiffres seuls ne peuvent jamais saisir. Pourtant, ces chiffres sont utilisés à tout-va, comme des armes dans une bataille absurde où chacun tente de prouver qui souffre le plus. Mais soyons clairs : ces chiffres, peu importe comment on les manipule, ne reflètent pas la réalité. Ils ne sont qu’une vague estimation, un reflet déformé, et la souffrance humaine ne se réduit pas à des pourcentages.

Et c’est là que réside le piège. 

Les chiffres sont devenus un jeu. Hommes et femmes se les balancent à la figure, comme des projectiles pour défier ceux qu’ils jugent « adversaires« . Chacun tente de prouver que son groupe souffre plus, que ses chiffres sont les plus accablants. Mais à quoi cela sert-il réellement ? À rien, sinon à entretenir un sentiment d’impuissance. Car en vérité, ces calculs, dont personne n’a vraiment la maîtrise, ne représentent qu’un rideau de fumée, un moyen de détourner l’attention de l’essentiel : l’action concrète.

"Tout le temps qu’on passe à se bagarrer sur les chiffres, on ne le passe pas à agir."

Ce comportement trahit un malaise profond : celui de ne pas savoir comment agir, et pire, celui de ne pas vouloir agir.

Tant qu’on se concentre sur les chiffres, on peut éviter de se confronter à la réalité de la violence. On peut se cacher derrière des débats sans fin et prétendre qu’on est actif. Mais en vérité, cette obsession des chiffres n’est rien d’autre qu’un alibi désespéré pour masquer l’inaction.

Elle sert ceux qui préfèrent polémiquer plutôt que prendre leurs responsabilités et avancer.

J’entends souvent dire que les groupes de victimes féminines se complaisent dans une énergie victimaire, mais cette dynamique, je la vois à l’identique chez les hommes. C’est un réflexe commun quand la souffrance est grande. On se compare, on se défie, on se perd dans des batailles d’ego pour prouver qui souffre le plus. Mais pendant ce temps, qui agit pour ces victimes ? Qui tend la main ? Qui propose des solutions ? Peu, trop peu hélas…

Je ne dis pas que les chiffres n’ont aucune utilité. Ils permettent une certaine compréhension, une mise en lumière des tendances. Mais se disputer sur qui souffre le plus ou qui est le plus sous-estimé nous détourne de la question la plus importante : que faisons-nous maintenant pour ces hommes et ces femmes victimes de violences conjugales ? Si nous continuons à nous enfoncer dans ce jeu de chiffres, nous passerons encore plus de temps à débattre et encore moins à agir.

"Se disputer sur des pourcentages, c’est comme se battre pour une place plus confortable sur le Titanic. Ce n’est pas ça qui arrêtera le naufrage."

Alors que faire concrètement ? Peut-être que ceux qui sont directement concernés sont les mieux placés pour proposer des solutions. Lorsque j’avance des idées, je me retrouve parfois confrontée à des réticences, avec des remarques du type : « Tu ne peux pas comprendre, tu n’es pas à ma place. » Peut-être. Mais ce que je comprends, c’est que ces guerres de chiffres, hommes ou femmes, ne nous mènent nulle part. Le vrai défi n’est pas de savoir combien d’hommes ou de femmes souffrent le plus, mais de savoir comment les aider, tous, sans distinction.

Il est grand temps de sortir de ce piège. Il est urgent d’arrêter de jouer avec des pourcentages et de compter les points, comme si c’était un match où la souffrance se mesure en chiffres. La violence, qu’elle touche un homme ou une femme, est tout aussi dévastatrice, et aucune statistique ne changera ce

Cesser de nous disputer sur des chiffres stériles est le premier pas vers des actions concrètes. Les calculettes ne sauveront personne. Il est temps de les ranger et de s’asseoir enfin autour de la table, non pas pour débattre encore, mais pour agir, ensemble. C’est en prenant des mesures réelles que nous ferons la différence. Ce ne sont pas les chiffres, qui ne seront jamais parfaits, mais bien nos actions qui changeront le cours des choses.

Témoignage : « Se battre pour des chiffres, mais qui agit vraiment ? »

Alain et Rock, deux membres actifs d’un groupe Facebook dédié aux hommes victimes de violences conjugales, illustrent parfaitement cette dynamique. Leur échange tourne autour des statistiques, un terrain glissant où chacun tente de prouver que les souffrances des hommes sont sous-estimées. Rock avance des chiffres tirés d’enquêtes sur les foyers : « Les hommes violentés représenteraient 35 % des victimes. » Alain, de son côté, remet en question la validité de ces enquêtes : « Impossible à savoir, ce genre de données seront fiables le jour où on interrogera tout le monde.« 

Le débat se poursuit, sans fin. À un moment donné, la frustration d’Alain éclate : « Les féministes sortent toujours leurs chiffres pour dire que ce n’est pas grave, que les hommes victimes sont minoritaires. » Cette phrase résume bien l’état d’esprit qui règne souvent dans ces discussions : une bataille entre chiffres, où chaque groupe se sent trahi ou sous-représenté.

J’interrompt alors la joute verbale avec une remarque percutante : « Tout le temps qu’on passe à se bagarrer sur les chiffres, on ne le passe pas à agir. » Mais l’échange continue de tourner en rond. Philippe conclut avec une note amère : « On m’a dit que je harcelais les parlementaires quand je parlais des hommes victimes dans leurs discours focalisés uniquement sur les femmes.« 

Ce témoignage, parmi tant d’autres, illustre bien l’éternelle guerre des chiffres, qui détourne l’attention de la véritable question : Quand allons-nous enfin agir pour les victimes, qu’elles soient hommes ou femmes ?

Geneviève SCHMIT – octobre 2024

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